De la vente, rien que de la vente
Pour comprendre la publicité, ou même pour en apprendre ne serait-ce que les rudiments, il convient de commencer par en avoir une juste conception. La publicité, c’est de la vente. Ses principes sont ceux de la vente. Les réussites, comme les échecs, dans ces deux domaines, sont imputables aux mêmes causes. C’est pourquoi toutes les questions sur la publicité devraient trouver réponse dans le registre de la vente.
Nous n’insisterons jamais assez sur ce point. Le seul objectif que poursuit la publicité, c’est de vendre. Sa rentabilité se définit uniquement en terme de ce qu’elle aura fait vendre.
Elle ne cherche pas à produire un effet en général. Elle ne sert pas à vous rendre populaire. Elle n’est pas principalement destinée à seconder vos vendeurs.
Traitez-la comme un vendeur à part entière. Forcez-la à rendre des comptes. Comparez son action avec celles de vos autres vendeurs. Calculez-en les coûts et les résultats. Ne lui accordez pas plus d’excuses qu’à un bon vendeur. Alors, vous ne risquerez jamais de vous enfoncer longtemps dans l’erreur.
La différence est uniquement une question de niveau. La publicité est une vente multipliée. Elle s’adresse à des milliers de gens, tandis qu’un vendeur ne s’adresse qu’à une personne à la fois. Elle implique donc un coût en fonction. Dans une annonce ordinaire, le mot revient en moyenne à dix dollars. C’est pourquoi une annonce doit être considérée comme un excellent vendeur.
Une erreur chez un vendeur ne coûte pas trop cher; dans une publicité, le manque à gagner se multiplie par mille. Il convient donc d’être plus prudent et plus exigeant avec la seconde.
Un vendeur médiocre ne fera du tort qu’à une petite partie de votre commerce, une mauvaise publicité entachera l’ensemble de l’entreprise.
Beaucoup croient que la publicité consiste à bien rédiger une annonce. Les raffinements littéraires n’ont pas plus à voir avec la publicité que l’art oratoire avec la vente. Il faut savoir s’y exprimer avec concision, clarté et de façon convaincante, tout comme un bon vendeur. Un style recherché est un inconvénient patent. De même qu’un style trop original. Ils détournent l’intérêt du lecteur du véritable sujet de l’annonce. Ils révèlent l’hameçon qui s’y cache. Toute tentative visible de vendre, suscite une résistance proportionnelle.
Il en va de la vente directe comme de la vente par écrit. Les beaux parleurs ne font pas les meilleurs vendeurs. Ils inspirent la crainte de la manipulation. Ils éveillent un doute: si tant d’efforts sont faits pour vendre, c’est parce que les seuls mérites de l’article sont insuffisants.
Les meilleurs vendeurs font rarement de grands orateurs. Ils disposent de trop peu de figures de rhétorique. Ce sont des individus authentiques, sincères, qui connaissent leurs clients et leur produit. La rédaction d’une annonce publicitaire doit posséder les mêmes caractéristiques. La majorité des publicitaires compétents a fait ses classes dans la
vente. Les meilleurs ont commencé par le démarchage de porte à porte. Ils peuvent être nuls en grammaire, tout ignorer de la rhétorique, mais ils savent comment utiliser les mots qui vont convaincre.
Il existe un moyen rapide et facile de trouver une réponse à un problème de publicité: posez-vous la question: «Est-ce que ça aiderait un vendeur à vendre l’article ? …. Est-ce que ça m’aiderait à le vendre si j’étais en face de mon client ? »
Une réponse franche à cette question permet d’éviter de commettre bien des erreurs. Mais quand on essaie de se vanter ou de se faire plaisir, on a peu de chances de faire vibrer la corde qui incite les gens à dépenser leur argent. D’aucuns ne jurent que par les slogans, les trouvailles prétentieuses. Les emploieriez-vous dans une vente de face à face ?
Connaissez-vous un seul client qui serait impressionné par ce genre de choses ? Si la réponse est négative, il y a peu de chances pour que cela s’avère fiable par écrit. D’autres vous disent: «Soyez bref, les gens lisent très peu.»
Diriez-vous la même chose à un vendeur ? Une fois que le prospect est là, devant lui, allez-vous le limiter à un certain nombre de mots ? Ce serait un handicap impensable. Il en va de même dans la publicité. Nos seuls lecteurs sont ceux que notre sujet intéresse. Personne ne lit une annonce publicitaire pour se distraire, qu’elle qu’en soit la longueur. Considérez vos lecteurs comme autant de prospects qui se tiendraient là, devant vous, désireux de s’informer. Dites-leur tout ce qu’il faut pour les faire agir.
Il en est maintenant qui ne croient qu’aux grands caractères et aux titres énormes. Et pourtant, ils n’iraient pas admirer un vendeur qui leur hurlerait dans les oreilles. Les gens lisent tout ce qu’ils ont envie de lire en caractères de 8 points. C’est la typographie normale de tous les journaux et de tous les magazines. Les gens y sont habitués. De plus gros caractères choquent autant qu’une hausse de volume sonore. Cela n’attire pas plus l’attention de façon utile. Ce peut ne pas être néfaste mais, en tout état de cause, c’est inutile et source de gaspillage. Le coût augmente considérablement et l’effet produit est grossier et criard.
Vous y rencontrerez des publicitaires qui seront à l’affût de tout ce qui est bizarre ou inhabituel. Ils ne veulent publier que des annonces qui se distinguent par l’originalité de leur style ou de leurs illustrations. Rechercheriez-vous la même chose chez un vendeur ?N’avons-nous pas remarqué que c’étaient justement ceux qui étaient vêtus normalement et qui se comportaient comme tout le monde qui produisaient la meilleure impression ?
D’autres encore insistent sur l’esthétique de leurs encarts. Il leur faut des fioritures, une petite touche d’élégance dans la présentation. Pourvu que l’on se cantonne à certaines limites, je n’y vois aucun mal, mais c’est vraiment superflu. Des annonces d’allure simple, tout comme des vendeurs simplement vêtus, ont fourni la preuve de leur très grande efficacité. Trop de décorum constitue une erreur.